Je m'appelle Mateo. Je ne suis pas arrivé au silence par désespoir, mais par pure curiosité. J'avais souvent entendu parler sur combien il est précieux de « simplement être », mais je ne l'avais jamais pris au sérieux. Un jour, sans raison particulière, j'ai décidé de m'arrêter. Non pas parce que je me sentais dépassé, mais parce que je commençais à soupçonner qu'il y avait quelque chose dans le silence que je n'avais pas encore découvert.
Je marchais sur un sentier peu fréquenté longeant une petite rivière. Je n'étais pas pressé, et je n'avais pas de destination. Le soleil se couchait obliquement, teintant d'or les pierres et les branches. Arrivé à un coude où l'eau formait une sorte de bras de mer tranquille, je me suis arrêté. L'endroit semblait suspendu dans le temps : pas de vent, pas de voix, seulement le bruit de l'eau qui glissait patiemment.
Je me suis assis sur un rocher lisse, encore tiède grâce au soleil. J'ai fermé les yeux, non pas pour méditer, mais pour écouter. Et ce que j'entendais n'était ni la rivière, ni les oiseaux, mais ma propre respiration, mon corps se détendant, mes pensées s'installant sans résistance. Il n'y avait ni lutte, ni quête. C'était comme si, l'espace d'un instant, tout avait la permission d'être, tout simplement.
Je suis resté là, immobile, bien plus longtemps que je ne l’aurais cru. Quand j'ai ouvert les yeux, tout m'a semblé plus clair. La texture de la mousse, la couleur exacte de l'eau, la courbe d'une branche flottante. Rien n'avait changé, mais tout était différent. Plus vivant. Plus proche.
Je n'ai pas reçu de grandes révélations. Seulement la certitude qu'il existe un coin où le temps ne pèse pas, où l'on n'a pas à se corriger, à s'expliquer, ni à accomplir quoi que ce soit. Ce coin n'était pas seulement au bord de la rivière. Il était, et est toujours, en moi. Parfois, le simple fait de rester immobile suffit à s'en souvenir.